Tabou n°7 : dans une transfo les patrons aussi ont besoin d’aide

Comme toute culture celle de la trans­for­ma­tion « fait silence » sur cer­tains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous pro­po­sons d’en décou­vrir sept pré­sents dans beau­coup de pro­jets. Pour­quoi ? Parce que « rompre le silence » per­met d’aborder les pro­jets d’une manière plus effi­cace. Tout simplement.

La mani­fes­ta­tion

N’avez-vous jamais enten­du dans des groupes pro­jets des conseils don­nés au patron absent du type « il fau­drait que Ber­trand tranche sur ce point…(alors qu’il attend de récol­ter tous les avis) » ? Ou le clas­sique « Isa­belle devrait écou­ter les remon­tées de la BU Ame­ri­ca, elle a vrai­ment du mal à écou­ter (alors qu’elle l’a déjà fait, à sa façon)… » ? ou encore « Que penses Phi­lippe de ce dérou­lé de la conven­tion (alors qu’il n’est pas encore entré dans le dossier) » ?

Dans une trans­for­ma­tion les équipes, les consul­tants attendent beau­coup du patron ou de la patronne. Ils attendent une orien­ta­tion, par­fois du récon­fort, sou­vent des direc­tives. Et, secrè­te­ment, cha­cun aime­rait qu’il soit un peu dif­fé­rent ce patron, un peu plus ci, un peu moins ça. Et comme l’organisation se trans­forme, que tout le monde se trans­forme selon le tabou n°6, s’il pou­vait en pro­fi­ter pour chan­ger dans un sens qui m’arrange bien….

Il y a un espoir et une illu­sions par­ti­cu­liers sus­ci­tés par la posi­tion du diri­geant. Or dans une trans­for­ma­tion, s’il a une res­pon­sa­bi­li­té impor­tante, le patron fait face à des situa­tions incon­for­tables, à des déci­sions floues, à des cas de conscience, à des tâton­ne­ments, lui qui est cen­sé tou­jours aller bien, savoir quoi déci­der et ne pas se trom­per. Pour faire ce che­min de trans­for­ma­tion, le diri­geant, comme nous tous, a besoin d’aide. Tout sim­ple­ment. Sans que cela n’enlève rien ni à sa com­pé­tence ni à son autorité.

Le tabou

Dans une trans­fo un patron aus­si a besoin d’aide

Un exemple

En 2019 dans le sec­teur public, le direc­teur reste tout puis­sant. Dans la lettre des textes défi­nis­sant ses res­pon­sa­bi­li­tés et les délé­ga­tions qu’il donne, comme dans la tête de bien des col­la­bo­ra­teurs. Consé­quence directe, les diri­geants du monde publique sont géné­ra­le­ment très com­pé­tents, très habi­tés par leurs res­pon­sa­bi­li­tés qu’ils tiennent sou­vent avec cou­rage et brio.

La trans­for­ma­tion de l’action publique est pro­fonde. Dans une de ces trans­for­ma­tions, le direc­teur, hyper com­pé­tent et hyper res­pec­té n’arrivait pas à mettre les mots sur ce qu’il sou­hai­tait dans une situa­tion mana­gé­riale un peu com­pli­qué. Son Comi­té de Direc­tion, avouons-le, pro­fi­tait un peu de la situa­tion, râlait après ceux qui ne fai­sait pas leur part, sans cher­cher à résoudre le pro­blème. Tout sim­ple­ment le direc­teur avait besoin d’un peu d’aide pour for­mu­ler clai­re­ment son insa­tis­fac­tion. Comme cette insa­tis­fac­tion était mana­gé­riale et non tech­nique, il était moins à l’aise que d’habitude, mais pas moins per­ti­nent. L’aider à for­mu­ler clai­re­ment son point per­mis non seule­ment de cla­ri­fier sa pen­sée mais aus­si que tous com­prennent mieux com­ment agir, tout spé­cia­le­ment les per­sonnes impli­quées. Sans que cela n’enlève rien à son auto­ri­té, son image, son prestige.

Les béné­fices de regar­der le tabou en face

Il existe beau­coup de rai­sons conscientes et incons­cientes pour les­quelles nous nour­ris­sons des illu­sions sur le patron. Les explo­rer ce n’est pas l’objectif. Quel béné­fice pou­vons-nous tirer à regar­der ce tabou en face ? Com­ment deve­nir anti­fra­gile sur ce point ?

Une fois que ce besoin d’aide est accep­té par celui qui peut le don­ner cela nous per­met de voir les choses tota­le­ment dif­fé­rem­ment. Je vois très sou­vent des exemples ou les patrons ont besoin d’aide pour for­mu­ler clai­re­ment des direc­tives qui une fois claires seront très contrai­gnantes. Il n’y a aucune contra­dic­tion entre le fait que le ou la cheffe ait besoin d’aide et le fait qu’il ou elle ait le pou­voir. L’aide appor­ter per­met au patron d’exercer plei­ne­ment ses res­pon­sa­bi­li­tés. Tout simplement.

Cerise sur le gâteau pour ceux qui y arrivent vrai­ment, ils pas­se­ront du sta­tut de four­nis­seur ou cour­ti­san à celui de par­te­naire. Ça vaut le coup.

Pour aller plus loin

Pour apprendre des outils faci­li­tant cette aide à appor­ter aux diri­geants, vous pou­vez par­ti­ci­per au pro­chain ate­lier « la trans­for­ma­tion anti­fra­gile » : dates et ins­crip­tions ici :

 

Cré­dit pho­to : Jus­tin Tru­deau, pre­mier ministre du Cana­da sur https://pm.gc.ca/fr/photos/2019/05/16/premier-ministre-trudeau-assiste-diner-organise-president-macron-au-palais-de

Tabou n°6 : Se transformer c’est pour moi aussi

Comme toute culture celle de la trans­for­ma­tion « fait silence » sur cer­tains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous pro­po­sons d’en décou­vrir sept pré­sents dans beau­coup de pro­jets. Pour­quoi ? Parce que « rompre le silence » per­met d’aborder les pro­jets d’une manière plus effi­cace. Tout simplement.

La mani­fes­ta­tion

« Il fau­drait qu’ils…. » « si seule­ment elle… » on entend sou­vent ce genre de phrases dans les conver­sa­tions usuelles des pro­jets de trans­fo. Assez natu­rel­le­ment nous regar­dons les choses que les autres doivent chan­ger sans voir que très sou­vent nous-mêmes nous avons, de manière un peu bizarre, le même che­min à faire.

Autre face de la même pièce, il est facile de consta­ter chez les autres qu’ils prêchent une agi­li­té ou une bien­veillance qui leur fait, à eux aus­si, défaut. Obser­ver ce type de com­por­te­ment incon­gruent nous ren­seigne beau­coup sur ce phé­no­mène spé­ci­fique de la trans­for­ma­tion, qu’il est fon­da­men­tal de se regar­der soi même.

Le tabou

Conduire ou accom­pa­gner une trans­for­ma­tion demande de se trans­for­mer soi même (au moins un petit peu).

Un exemple

En 2016, une socié­té de ser­vice finan­cier fit appel à nous car la nou­velle équipe avait trou­vé dans la DSI 40 chefs de pro­jet qui “ne savait pas faire leur tra­vail”, bien qu’ils fussent pour la plu­part plein de bonnes volon­tés. Le pro­jet deman­da à ce que nous les for­mions. Au fil du pro­jet nous nous ren­dîmes compte que les chefs de pro­jet n’é­taient pas les seuls à avoir besoin d’ap­prendre une nou­velle façon de faire leur métier. Le DSI était dans le même cas, et nous aus­si bien sûr !

Les béné­fices de regar­der le tabou en face

Il existe beau­coup de rai­sons conscientes et incons­cientes pour les­quelles nous gar­dons silence sur ce que nous sommes appe­lés à chan­ger. Les explo­rer nous per­drait sans néces­sai­re­ment nous aider à en sor­tir. Ce n’est pas l’objectif. Quel béné­fice pou­vons-nous tirer à regar­der ce tabou en face ? Com­ment deve­nir anti­fra­gile sur ce point.

L’a­van­tage prin­ci­pal de regar­der ce tabou en face consiste à dédra­ma­ti­ser le chan­ge­ment qui est néces­saire pour soi-même. Je le répète à lon­gueur d’ar­ticle sur ce blog, la trans­for­ma­tion c’est d’a­bord pour soi-même. Par exemple dans la néces­si­té de super­vi­sion ou bien enten­du dans le pro­ces­sus paral­lèle. C’est évident et ce n’est pas une grande affaire. Plus pré­ci­sé­ment c’est d’au­tant moins une grande affaire que nous n’y atta­chons pas une impor­tance déme­su­rée. Bien sûr en che­min nous nous ren­drons compte d’une ou deux erreurs, d’un man­que­ment ou d’une incom­pé­tence. Mais nous nous ren­drons compte sim­ple­ment, jamais nous ne devien­drons incom­pé­tent. Nous aug­men­te­rons peut-être la com­pré­hen­sion de nos limites, mais para­doxa­le­ment cette meilleure com­pré­hen­sion de nos limites les dimi­nue­ra au lieu de les aug­men­ter. Nos limites ont cette carac­té­ris­tiques d’aug­men­ter avec notre refus de les voir. Donc en les regar­dant en face, nous en limi­te­rons les effets. N’est-ce pas pro­pre­ment génial ?

Pour aller plus loin

Cette notion est au cœur de mon inté­rêt pour l’anti­fra­gi­li­té dans le métier et en géné­ral.

Pour apprendre à uti­li­ser les obs­tacles au pro­fit du pro­jet et rendre la trans­for­ma­tion anti­fra­gile vous pou­vez par­ti­ci­per au pro­chain ate­lier « la trans­for­ma­tion anti­fra­gile » : dates et ins­crip­tions ici.

Tabou n°5 : Se transformer demande du courage

Comme toute culture celle de la trans­for­ma­tion « fait silence » sur cer­tains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous pro­po­sons d’en décou­vrir sept pré­sents dans beau­coup de pro­jets. Pour­quoi ? Parce que « rompre le silence » per­met d’aborder les pro­jets d’une manière plus effi­cace. Tout simplement.

La mani­fes­ta­tion

Il existe une conver­sa­tion type dans les inter­stices des pro­jets de trans­fo qui consiste à déplo­rer le com­por­te­ment d’une popu­la­tion « Nos patrons de BU pour­rait don­ner l’exemple » ou d’une per­sonne  « pour­quoi le lea­der ne dit-il pas clai­re­ment les choses ? ». Les inter­ro­ga­tions vont alors bon train, déplo­rant que tel com­por­te­ment d’un lea­der freine le pro­jet ou que tel manque d’exemplarité le dis­cré­dite. Explo­rer ces décep­tions conduit qua­si sys­té­ma­ti­que­ment à inter­pré­ter ce com­por­te­ment comme venant d’une peur. Peur de cho­quer, peur de se trom­per, peur d’aller trop vite, peur que ce nou­veau che­min ne soit pas le bon, peur de perdre de son pres­tige, de son auto­ri­té voire même son job.

La conver­sa­tion type se pour­suit alors pour déplo­rer cette peur, par­fois la blâ­mant tout haut, plus sou­vent conser­vant cette appré­cia­tion in pet­to. Ce n’est pas très élé­gant de se moquer de la peur des autres. Ni très effi­cace d’ailleurs car les admo­nes­ta­tions à ne pas avoir peur marchent rarement.

Rare­ment est loué le cou­rage que cela demande à un diri­geant de bri­ser le sta­tu quo, le cou­rage que cela demande à un res­pon­sable de tes­ter les nou­veaux pro­duits au risque de man­quer ses objec­tifs, le cou­rage qu’il faut à un simple col­la­bo­ra­teur pour sou­li­gner publi­que­ment une contra­dic­tion. Pour­tant qui dit peur dit cou­rage, c’est l’autre face de la même pièce.

Plus direc­te­ment, affron­ter le fac­teur émo­tion­nel (tabou n°3) ou chan­ger réel­le­ment ses habi­tudes de col­la­bo­ra­tion (tabou n°4) cela demande du cou­rage, le cou­rage per­son­nel de se conte­nir, de se remettre en ques­tion. Or toutes ces actions seront néces­saires au cours d’une trans­for­ma­tion et toutes demandent du courage.

Le tabou

Mener une trans­for­ma­tion demande du cou­rage et pas uni­que­ment celui de se remettre en cause.

Un exemple

Durant les années 2017 2018, la fran­chise fran­çaise d’un grand part­ner­ship mon­dial de ser­vices pro­fes­sion­nels déci­da d’adapter sa stra­té­gie aux chan­ge­ments pro­fonds de son envi­ron­ne­ment. Une orga­ni­sa­tion en part­ner­ship, très plate, demande de bâtir un fort consen­sus. Choi­sir une stra­té­gie c’est choi­sir des prio­ri­tés. Dans un part­ner­ship cela signi­fie lais­ser des acti­vi­tés de côté et donc deman­der à cer­tains part­ners des sacri­fices voire des chan­ge­ments d’activité. Entrer dans la dis­cus­sion demande du cou­rage à celui qui l’anime, le cou­rage d’affronter les résis­tances et les récri­mi­na­tions. Et sor­tir de la dis­cus­sion en deman­de­ra au patron de BU concer­nés qui aban­don­ne­ront leur inté­rêt indi­vi­duel court terme pour le bien col­lec­tif de long terme.

Les béné­fices de regar­der le tabou en face

Il existe beau­coup de rai­sons conscientes et incons­cientes pour les­quelles nous gar­dons silence sur les émo­tions en géné­ral et la peur en par­ti­cu­lier. Les explo­rer nous per­drait sans néces­sai­re­ment nous aider à en sor­tir. Ce n’est pas l’objectif. Quel béné­fice pou­vons-nous tirer à regar­der ce tabou en face ? Com­ment deve­nir anti­fra­gile sur ce point ?

Le béné­fice est un béné­fice de pos­ture. Si nous consi­dé­rons que les gens ont peur, nous allons prendre natu­rel­le­ment une posi­tion de don­neur de leçon. Alors que si nous consi­dé­rons le fait que cela demande du cou­rage, alors nous pren­drons plus faci­le­ment la pos­ture d’en­traî­neur. Ce qui change tout car cela débloque beau­coup de situa­tions. Sou­vent le simple fait de dire cela “cela demande du cou­rage” cela suf­fit à aider la per­sonne en face de vous a en avoir du cou­rage. Alors que “dépasse ta peur”, fran­che­ment, ça marche moins bien.

Pour aller plus loin

Pour pour­suivre la des­crip­tion du cas ini­tiés j’ai écrit un article explo­rant le cou­rage que cela demande d’animer des dis­cus­sions d’alignement que vous pou­vez trou­ver ici : : http://emmanuelmas.com/2019/06/20/le-courage-de-lalignement/

Pour apprendre à uti­li­ser les obs­tacles au pro­fit du pro­jet et rendre la trans­for­ma­tion anti­fra­gile vous pou­vez par­ti­ci­per au pro­chain ate­lier « la trans­for­ma­tion anti­fra­gile » : dates et ins­crip­tions ici : http://www.latransfodanslapeau.com/formation/

 

Cré­dit pho­to : départ du Red Bull Ram­page 2019 — https://www.pinterest.fr/pin/710020697483244677/

Tabou n°4 : Se transformer demande de changer de mode de collaboration

Comme toute culture celle de la trans­for­ma­tion « fait silence » sur cer­tains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous pro­po­sons d’en décou­vrir sept pré­sents dans beau­coup de pro­jets. Pour­quoi ? Parce que « rompre le silence » per­met d’aborder les pro­jets d’une manière plus effi­cace. Tout simplement.

La mani­fes­ta­tion

Appa­rem­ment, une trans­for­ma­tion sou­lève beau­coup de contradictions.

Dans cer­taines orga­ni­sa­tions où la digi­ta­li­sa­tion bous­cule les silos il n’est pas rare d’entendre des dis­cours du type « nous devons col­la­bo­rer plus ouver­te­ment » alors même que toutes les réunions ont des agen­das tel­le­ment bour­rés que l’on n’en arrive jamais au bout. Avec de tels agen­da, impos­sible de prendre le temps de s’écouter, d’explorer un sujet com­plexe. Le temps presse, l’ordre du jour prime. Mal­heu­reu­se­ment apprendre de nou­velles manières de col­la­bo­rer demande du temps.

Autre contra­dic­tion typique l’in­jonc­tion « deve­nons agile ». Une orga­ni­sa­tion sou­haite déve­lop­per son agi­li­té alors que toute déci­sion d’investissement doit être vali­dée par des chefs dont les agen­das sont pleins sur les 8 pro­chains mois. Comme lais­ser de la place à l’imprévu, sol­li­ci­ter un avis sur une ques­tion pres­sante, réagir rapidement ?

Ces contra­dic­tions appa­rentes révèlent la culture de col­la­bo­ra­tion, de dia­logue de l’organisation. Or cette culture, ces habi­tudes de dia­logue de l’organisation vont devoir évo­luer. Et comme elles touchent tout le monde, tout le monde sera concerné !

Le tabou

Dans une trans­for­ma­tion la manière dont les per­sonnes col­la­borent va évoluer.

Un exemple

Fin 2018, un ges­tion­naire d’actif fit face au retour­ne­ment de cer­tains mar­chés qui remirent en cause sa per­for­mance. Très sou­cieux de déve­lop­per la col­la­bo­ra­tion, son direc­teur géné­ral uti­li­sa les réunions de CODIR heb­do­ma­daires de deux heures pour éla­bo­rer, ensemble, des plans d’actions. Ces plans d’actions tar­dèrent à arri­ver, le patron s’exaspérera de l’irresponsabilité de son CODIR. De leurs côtés, les membres du CODIR consta­taient une très nette dété­rio­ra­tion du cli­mat de col­la­bo­ra­tion sans pou­voir en iden­ti­fier les causes.

Pre­nant un peu de recul, l’équipe se ren­dit compte qu’elle cher­chait à explo­rer de nou­velles solu­tions dans un mode de col­la­bo­ra­tion contraint, adap­té à la ges­tion opé­ra­tion­nelle cou­rante. Ils déci­dèrent donc d’adapter leurs moda­li­tés de col­la­bo­ra­tion à leurs nou­veaux objec­tifs en se ména­geant tous les 2/3 mois des réunions longues per­met­tant d’explorer ensemble les sujets stra­té­giques. Par ailleurs le sui­vi des plans d’actions cor­rec­tifs fut concen­tré entre les mains de deux diri­geants qui s’économisèrent ain­si de longues revues sté­riles au reste de l’équipe.

Les béné­fices de regar­der le tabou en face

Il existe beau­coup de rai­sons conscientes et incons­cientes pour les­quelles nous gar­dons silence sur ce chan­ge­ment pro­fond de manière de fonc­tion­ner. Les explo­rer nous per­drait sans néces­sai­re­ment nous aider à en sor­tir. Ce n’est pas l’objectif. Quel béné­fice pou­vons-nous tirer à regar­der ce tabou en face ? Com­ment deve­nir anti­fra­gile sur ce point

Regar­der ce tabou en face per­met de s’interroger sur les condi­tions pra­tiques à faire évo­luer pour faci­li­ter la trans­for­ma­tion. En d’autre termes cela per­met d’a­na­ly­ser tous les pro­blèmes de fonc­tion­ne­ment comme des indi­ca­tions de ce que nous avons à faire évo­luer dans nos modes de fonc­tion­ne­ment plu­tôt que comme des pro­blèmes à faire dis­pa­raître. Décul­pa­bi­li­sante, cette ana­lyse débou­che­ra, comme dans l’exemple pré­cé­dent, sur des chan­ge­ments très concrets et pra­tiques, et donc simples à mettre en place. Ces chan­ge­ments concer­ne­ront géné­ra­le­ment trois dimen­sions : la nature des réunions, leur durée/fréquence et les moda­li­tés pra­tiques de dis­cus­sion et de décision.

Pour aller plus loin

Com­ment ana­ly­ser les moda­li­tés de col­la­bo­ra­tion d’une équipe ou d’une orga­ni­sa­tion d’une manière simple et pra­tique ? Pour l’ex­pé­ri­men­ter vous pou­vez par­ti­ci­per au pro­chain ate­lier « la trans­for­ma­tion anti­fra­gile »Dates et inscription

Cré­dit pho­to : Tom Pum­ford on Uns­plash

Tabou n°2 : La transfo ce n’est pas du changement

Comme toute culture celle de la trans­for­ma­tion « fait silence » sur cer­tains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous pro­po­sons d’en décou­vrir sept pré­sents dans beau­coup de pro­jets. Pour­quoi ? Parce que « rompre le silence » per­met d’aborder les pro­jets d’une manière plus efficace.

La mani­fes­ta­tion

Aujourd’hui la trans­for­ma­tion est omni­pré­sente, dans toutes les com­mu­ni­ca­tions, dans toutes les orga­ni­sa­tions, dans tous les dis­cours. Le mot à la mode, semble uti­li­sé à toutes les sauces, per­dant ain­si peu à peu son sens spé­ci­fique. Quelques années plus tôt, les pro­fes­sion­nels dis­tin­guaient l’accompagnement au chan­ge­ment de la trans­for­ma­tion. Cette der­nière se dif­fé­ren­ciait alors par son ampleur, sa pro­fon­deur, par la dif­fi­cul­té à défi­nir pré­ci­sé­ment la situa­tion cible. Aujourd’hui l’usage d’un même mot ne per­met plus de dis­tin­guer la nuance qu’il y a entre conduire habi­le­ment un pro­jet au résul­tat connu et explo­rer ensemble vers un but glo­ba­le­ment clair mais dont les contours res­tent à définir.

Dans la défi­ni­tion que je reprends à la Har­vard Busi­ness Review (voir plus bas), la trans­for­ma­tion se dis­tingue du chan­ge­ment par l’incertitude. Dans un chan­ge­ment il est pos­sible d’expliquer aux gens com­ment ils vont tra­vailler dans l’état final, quand le pro­jet aura abou­ti. Dans une trans­for­ma­tion, c’est impos­sible. Cette incer­ti­tude fait toute la dif­fi­cul­té d’un pro­jet. Quand par exemple un cabi­net de conseil comme le notre invente un nou­veau métier, c’est de la trans­for­ma­tion. Impos­sible d’expliquer pré­ci­sé­ment à quoi res­sem­ble­ra notre métier quand nous l’aurons inven­té, puisque sinon nous  l’au­rions déjà inven­té. A contra­rio lorsqu’un nou­vel outil de par­tage de fichiers est mis en place, c’est sans doute du chan­ge­ment s’il est pos­sible de décrire la manière de tra­vailler qui sera appli­quée à la fin du pro­jet de manière simple et claire.

Un de mes clients a fait le che­min inverse : le mot trans­for­ma­tion était tel­le­ment uti­li­sé, qu’ils l’appliquent main­te­nant aux pro­jets à objec­tifs pré­cis, gar­dant le terme change en anglais pour dési­gner les pro­jets aux résul­tats explo­ra­toires ou incer­tains. Évi­tons les que­relles de défi­ni­tion, ce qui compte c’est de bien dif­fé­ren­cier les deux types de projets.

Le tabou

La trans­for­ma­tion ce n’est pas du changement.

Un exemple

En 2015 nous fûmes appe­lés par un nom pres­ti­gieux du Paris Cor­po­rate pour un pro­jet de… démé­na­ge­ment. Nous consi­dé­rant comme des pro­fes­sion­nels inno­vants de la trans­for­ma­tion j’étais un peu vexé de ce pro­jet que je consi­dé­rais comme indigne car trop simple. Chan­ger de locaux me parais­sait simple.

Che­min fai­sant nous nous ren­dîmes compte que l’enjeu du pro­jet dépas­sait lar­ge­ment le fait de dépla­cer des meubles. Le patron sou­hai­tait uti­li­ser le chan­ge­ment de locaux pour chan­ger la manière de tra­vailler. Il sou­hai­tait inven­ter une autre manière de col­la­bo­rer. Il fal­lait donc inven­ter ensemble cette col­la­bo­ra­tion nou­velle. Je m’étais trom­pé, c’était bien un pro­jet de trans­for­ma­tion. Il était impos­sible de décrire aux gens com­ment on vou­lait qu’ils tra­vaillent puisque per­sonne ne le savait. C’était à eux de l’inventer. Nous explo­rions. Le pro­jet concer­nait bien une trans­for­ma­tion au sens défi­ni plus haut. Aujourd’hui, en 2019, quand je vois dans ces locaux les gens col­la­bo­rer, se com­por­ter dif­fé­rem­ment d’il y a quelques années, je suis fier d’avoir aidé à cette véri­table transformation.

Les béné­fices de regar­der le tabou en face

Il existe sans doute beau­coup de rai­sons conscientes et incons­cientes pour les­quelles nous gar­dons silence sur ce tabou. Les explo­rer nous pren­drait beau­coup de temps sans néces­sai­re­ment nous aider à sor­tir par le haut. Ce n’est pas l’objectif. Quel béné­fice pou­vons-nous tirer à regar­der ce tabou en face ? Com­ment deve­nir anti­fra­gile sur ce point.

Savoir si notre pro­jet relève du chan­ge­ment ou de la trans­for­ma­tion per­met de chan­ger la manière de l’aborder. Dans un pro­jet à l’issue incer­taine, les temps col­lec­tifs ser­vi­ront majo­ri­tai­re­ment à co-construire, tâton­ner, explo­rer ensemble. Dans cette optique, toutes les cri­tiques enri­chi­ront la com­pré­hen­sion de ce qu’il s’agit de faire. Sous réserve de s’être struc­tu­ré de la bonne manière, le pro­jet pour­ra pro­fi­ter de tous ces obs­tacles pour se raffiner.

Dans un pro­jet de chan­ge­ment au contraire, cher­cher à co-construire avec des col­la­bo­ra­teurs « pour faire pas­ser la pillule » alors que la direc­tion du pro­jet sait à quoi elle veut abou­tir pro­dui­ra des effets décep­tifs et enta­me­ra la confiance. Pour que le pro­jet avance bien il vau­dra mieux mettre l’énergie à cla­ri­fier les inten­tions, expli­ci­ter le sens du chan­ge­ment et décrire pré­ci­sé­ment la situa­tion cible pour chaque population.

Cha­cun de ces deux types de pro­jets demandent donc des tech­niques, des savoir-faire spé­ci­fiques, utiles dans les deux cas mais avec des prio­ri­tés dif­fé­rentes. Si pra­ti­quer les deux types de pro­jets per­met de s’aguerrir sur cha­cun de ces savoir-faire, se trom­per de prio­ri­té peut s’avérer désas­treux si par exemple cela conduit à faire par­ti­ci­per des col­la­bo­ra­teurs en mal d’ex­pli­ca­tion ou  à expli­quer doc­te­ment un état final indescriptible.

Pour aller plus loin

Pour creu­ser cette dis­tinc­tion je recom­mande l’article (en anglais) de la Har­vard Busi­ness Review sui­vant : https://hbr.org/2015/01/we-still-dont-know-the-difference-between-change-and-transformation

Pour apprendre à uti­li­ser les obs­tacles au pro­fit du pro­jet et rendre la trans­for­mai­ton anti­fra­gile vous pou­vez par­ti­ci­per au pro­chain ate­lier « la trans­for­ma­tion anti­fra­gile » : dates et ins­crip­tions ici : http://www.latransfodanslapeau.com/formation/