Tabou n°4 : Se transformer demande de changer de mode de collaboration
Comme toute culture celle de la transformation « fait silence » sur certains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous proposons d’en découvrir sept présents dans beaucoup de projets. Pourquoi ? Parce que « rompre le silence » permet d’aborder les projets d’une manière plus efficace. Tout simplement.
La manifestation
Apparemment, une transformation soulève beaucoup de contradictions.
Dans certaines organisations où la digitalisation bouscule les silos il n’est pas rare d’entendre des discours du type « nous devons collaborer plus ouvertement » alors même que toutes les réunions ont des agendas tellement bourrés que l’on n’en arrive jamais au bout. Avec de tels agenda, impossible de prendre le temps de s’écouter, d’explorer un sujet complexe. Le temps presse, l’ordre du jour prime. Malheureusement apprendre de nouvelles manières de collaborer demande du temps.
Autre contradiction typique l’injonction « devenons agile ». Une organisation souhaite développer son agilité alors que toute décision d’investissement doit être validée par des chefs dont les agendas sont pleins sur les 8 prochains mois. Comme laisser de la place à l’imprévu, solliciter un avis sur une question pressante, réagir rapidement ?
Ces contradictions apparentes révèlent la culture de collaboration, de dialogue de l’organisation. Or cette culture, ces habitudes de dialogue de l’organisation vont devoir évoluer. Et comme elles touchent tout le monde, tout le monde sera concerné !
Le tabou
Dans une transformation la manière dont les personnes collaborent va évoluer.
Un exemple
Fin 2018, un gestionnaire d’actif fit face au retournement de certains marchés qui remirent en cause sa performance. Très soucieux de développer la collaboration, son directeur général utilisa les réunions de CODIR hebdomadaires de deux heures pour élaborer, ensemble, des plans d’actions. Ces plans d’actions tardèrent à arriver, le patron s’exaspérera de l’irresponsabilité de son CODIR. De leurs côtés, les membres du CODIR constataient une très nette détérioration du climat de collaboration sans pouvoir en identifier les causes.
Prenant un peu de recul, l’équipe se rendit compte qu’elle cherchait à explorer de nouvelles solutions dans un mode de collaboration contraint, adapté à la gestion opérationnelle courante. Ils décidèrent donc d’adapter leurs modalités de collaboration à leurs nouveaux objectifs en se ménageant tous les 2/3 mois des réunions longues permettant d’explorer ensemble les sujets stratégiques. Par ailleurs le suivi des plans d’actions correctifs fut concentré entre les mains de deux dirigeants qui s’économisèrent ainsi de longues revues stériles au reste de l’équipe.
Les bénéfices de regarder le tabou en face
Il existe beaucoup de raisons conscientes et inconscientes pour lesquelles nous gardons silence sur ce changement profond de manière de fonctionner. Les explorer nous perdrait sans nécessairement nous aider à en sortir. Ce n’est pas l’objectif. Quel bénéfice pouvons-nous tirer à regarder ce tabou en face ? Comment devenir antifragile sur ce point
Regarder ce tabou en face permet de s’interroger sur les conditions pratiques à faire évoluer pour faciliter la transformation. En d’autre termes cela permet d’analyser tous les problèmes de fonctionnement comme des indications de ce que nous avons à faire évoluer dans nos modes de fonctionnement plutôt que comme des problèmes à faire disparaître. Déculpabilisante, cette analyse débouchera, comme dans l’exemple précédent, sur des changements très concrets et pratiques, et donc simples à mettre en place. Ces changements concerneront généralement trois dimensions : la nature des réunions, leur durée/fréquence et les modalités pratiques de discussion et de décision.
Pour aller plus loin
Comment analyser les modalités de collaboration d’une équipe ou d’une organisation d’une manière simple et pratique ? Pour l’expérimenter vous pouvez participer au prochain atelier « la transformation antifragile » : Dates et inscription
Crédit photo : Tom Pumford on Unsplash