Comme toute culture celle de la transformation « fait silence » sur certains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous proposons d’en découvrir sept présents dans beaucoup de projets. Pourquoi ? Parce que « rompre le silence » permet d’aborder les projets d’une manière plus efficace. Tout simplement.
La manifestation
Tous les projets de transformation rencontrent, sous une manière ou sous une autre des incompréhensions voire des manifestations de rejets plus ou moins actives. Dans les équipes qui gèrent ces projets, beaucoup d’énergie est dépensée, à juste titre, pour trouver les « bons messages » à communiquer, les « bonnes modalités » de participations à des ateliers. Implicitement ces « bons messages » ou « bonnes modalités » seront censés diminuer les incompréhensions et les rejets de principe. Plus positivement les équipes projets viseront également à « embarquer » dans leur projet, c’est-à-dire à obtenir un comportement de la part de leurs interlocuteurs qui soit différent de d’habitude, qui change et qui aide l’organisation à changer.
Que ce soit pour « embarquer » ou pour simplement « diminuer les résistances », qu’est-ce que nous cherchons à faire dans ces cas-là ? Nous cherchons à créer ou à éviter chez nos interlocuteurs certaines émotions. Nous cherchons à créer des émotions positives qui conduiront à l’engagement ou à éviter des émotions négatives qui conduiraient au rejet. Mais nous n’en parlons jamais comme ça.
Le tabou
La réussite d’une transformation c’est avant tout une question émotionnelle
Un exemple
En 2013 nous fûmes appelés par le nouveau dirigeant d’une société de distribution en difficulté financière qui venait d’être intégrée dans un groupe et devait de ce fait procéder à beaucoup de changement de mise en conformité avec les outils groupe en même temps qu’elle devait se transformer pour retrouver une performance perdue. Le dirigeant se préoccupait, à juste titre, de la pression émotionnelle dans laquelle il allait mettre l’organisation. Il nous demanda donc de l’aider à en prendre la mesure.
La première réunion du projet consista à établir un diagnostic partagé en Comité de Direction. Lors des entretiens individuels, nous entendîmes que chacun appréhendait beaucoup cette réunion, craignant une rupture si chacun exprimait ce qu’il pensait et surtout ressentait. Beaucoup se voyaient dans une impasse impossible avec cette multitude de projets à mener de front en sus d’une transformation. Le stress était intense, palpable.
Lors de la réunion, chacun put exprimer son ressenti face au projet de manière simple (vert positif, rouge négatif) sur les différentes dimensions du projet. A l’issue de la séquence d’expression, le DSI exprima le sentiment général « finalement nous voulons tous réussir et nous avons tous peur de ne pas y arriver, mais sur des dimensions différentes. ».
Abordant régulièrement de cette manière la gestion du projet, ils réussirent l’exploit de redresser l’entreprise en changeant tout le système d’information en seulement 18 mois.
Les bénéfices de regarder le tabou en face
Il existe beaucoup de raisons conscientes et inconscientes pour lesquelles nous gardons silence sur les émotions. Les explorer nous perdrait sans nécessairement nous aider à en sortir. Ce n’est pas l’objectif. Quel bénéfice pouvons-nous tirer à regarder ce tabou en face ? Comment devenir antifragile sur ce point
Regarder le fait émotionnel en face demande de l’écouter sans réagir. Cette écoute contenue demandera systématiquement un effort personnel, mais lorsque nous y arrivons, le problème évoqué paraîtra toujours moins gros que celui envisagé initialement. Tout se passe comme si notre volonté de taire l’émotionnel augmentait ses conséquences. En ce sens c’est sans doute le tabou de la transformation qui a les conséquences les plus importantes.
Comme nous avons de bonnes raisons de taire ce fait émotionnel, le regarder en face demande des conditions, des outils. Sans outils ni formation, ce tabou reste difficile à appréhender. Le moment un peu magique ou après l’expression, le problème « se dégonfle » reste difficile à atteindre.
Plusieurs manières de procéder existent, plus ou moins impliquantes pour les participants. L’outil que j’utilise est très simple et à la portée de tous, quel que soit son niveau de proximité et d’aisance avec ses propres émotions. Cet outil, que nous appelons le baromètre est décrit largement ici : http://www.latransfodanslapeau.com/barometre/
Pour aller plus loin
Le projet cité en exemple a fait l’objet d’un séminaire de l’Ecole de Paris durant lequel le dirigeant et moi-même nous témoignâmes. Le compte rendu est disponible en ligne : https://www.ecole.org/fr/seance/1142-prendre-le-pouls-d-une-entreprise-hypertendue.
Pour apprendre à utiliser cet outil simple et très puissant qui gère l’émotionnel sans le dire vous pouvez participer au prochain atelier « la transformation antifragile » : dates et inscriptions ici.
Crédit photo : Tom Pumford on Unsplash
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